Du Mercure dans les poissons du lac de Cazaux-Sanguinet

De fortes quantités de mercure ont été identifiées dans des poissons du lac. Ce métal lourd très toxique peut entraîner des dérèglements du système nerveux central, notamment chez les enfants et femmes enceintes.

A partir de 2008, la SAN a procédé à plusieurs analyses d’échantillons de poissons, recherchant d’éventuelle traces de métaux lourds, PCB et dioxines. Ces analyses ont révélées la présence significative de Mercure dans la chair des poissons.

ANALYSES 2008 – BROCHET

Ces analyses ont été menées sur un brochet pêché début juin 2008 dans la baie d’Ispe (lac de Cazaux-Sanguinet). La préparation des filets a été réalisée par la SAN suivant les recommandations du laboratoire « AD Scientifique ». L’analyse a été effectuée par « AD Scientifique », laboratoire habilité IPRP (Intervenants Prévention des Risques Professionnels) pour les domaines technique et médical, agrémenté par le Ministère de l’environnement.

Résumé des résultats
SUBSTANCE CONCENTRATION NORME (*) UNITE
Mercure 0,84 1 µg/g
Dioxines et furanes 0,25 4 pg/g OMS-PCDD/F TEQ
PCB 1,18 4 pg/g OMS-PCDD/F TEQ
(*) réglementation européenne CE 466-2001 et CE 2375-2001.

ANALYSES 2009 – ANGUILLE ET PERCHE

Afin de vérifier si la teneur élevée en mercure est propre au poisson que nous avions analysé en 2008 ou commune à l’ensemble des poissons du lac, le mercure a été recherché dans une anguille et une perche. Les résultats sont les suivants :

POISSON CONCENTRATION NORME UNITE
Anguille (562g, 61cm) 0,4 1 µg/g
Perche (900g, 40cm) 0,26 0,5 µg/g

Si les taux de mercure restent en deçà de la norme européenne, ils sont néammoins élevés et préoccupants, en particulier sur le brochet (prédateurs en bout de chaîne alimentaire et donc fortement impacté par le phénomène de bioaccumulation).

ANALYSE 2012 – BROCHET

POISSON CONCENTRATION NORME UNITE
Brochet (1200g, 62cm) 0,06 1 µg/g

Le taux de mercure est faible mais il s’agit d’un brochet relativement petit.

ANALYSE 2014 – BROCHET

POISSON CONCENTRATION NORME UNITE
Brochet (1500g, 67cm) 0,06 1 µg/g

Le taux de mercure est faible mais il s’agit d’un brochet relativement petit.

INTERVIEW

Voici une interview du président et du secrétaire de la SAN réalisée fin 2009 (avec l’aimable autorisation de FR3 Aquitaine).


Qu’est ce que le Mercure ?

Les métaux sont des substances naturelles que l’on trouve dans le sol sous forme de minerai. Beaucoup de métaux sont indispensables aux organismes vivants mais peuvent devenir toxiques à forte dose. Contrairement aux substances organiques (comme la plupart des pesticides), les métaux ne peuvent être dégradés en des substances moins toxiques. Bien qu’il n’existe pas de définition stricte, un métal est généralement considéré comme lourd lorsque sa densité est supérieure à 5. Le mercure est l’un des métaux les plus toxiques, notamment classé 3ème, derrière l’arsenic et le plomb, dans le dans le top 20 des substances toxiques établi par l’ATSDR (Agency for Toxic Substances and Disease Registry, voir http://www.atsdr.cdc.gov/). Il est couramment utilisé dans différentes formes d’industries : il est par exemple utilisé pour la fabrication de piles, lampes, contacteurs…, dans les munitions pour la chasse ou les activités militaires, comme catalyseur et pigment dans l’industrie chimique, comme appareil de mesure ou pour la fabrication de fongicides. Il peut être absorbé par inhalation de vapeurs ou ingestion de composés du mercure. La contamination par contact cutané est plus rare.

La plupart des intoxications aiguës sont dues à du mercure élémentaire (métallique) chauffé et transformé en vapeur de mercure. En effet, celui-ci est mal assimilé par ingestion alors qu’il est très actif par inhalation. De fortes concentrations de vapeur de mercure provoquent toux, essoufflement, douleurs dans la poitrine, œdème pulmonaire et, dans les cas les plus graves, décès par défaillance respiratoire. Dans les cas moins graves, les effets nocifs vont concerner également le système nerveux avec apparition de tremblements, les reins et le système digestif.

De son côté, la toxicité chronique du mercure va notamment concerner des personnes exposées à des vapeurs de mercure de faible concentration durant une longue période, en général pour des raisons professionnelles. L’intoxication agit alors principalement sur le système nerveux central. Elle provoque la “maladie du chapelier fou” (le nitrate mercureux était utilisé autrefois pour la fabrication des chapeaux de feutre) : tremblements, manque de coordination des mouvements, modifications du comportement. Lorsque du mercure est présent dans l’environnement, il est transformé par des micro-organismes en mercure organique. Le méthylmercure est la plus dangereuse des formes organiques car il est très stable et il est très fortement bioaccumulé dans les organismes vivants. Le méthylmercure agit principalement sur le système nerveux, mais les reins et les yeux peuvent aussi être atteints.

Risques et recommandations liés à la consommation de poisson

La toxicité des poissons ou coquillages est différente de celle de l’eau. En effet, non seulement nous ne consommons pas la même quantité de poisson ou coquillage que d’eau, mais la concentration de produits toxiques diffère également. Cette différence de concentration s’explique par un phénomène appelé bioamplification ou bioaccumulation qui correspond à l’augmentation de concentration de produits toxiques dans les tissus d’un animal par rapport au milieu dans lequel il vit (s’utilise pour les animaux aquatiques). Le rapport entre les deux concentrations est le BCF (Bioconcentration factor). Ainsi, la consommation de poisson étant inférieure à celle de l’eau, seules les substances ayant un BCF supérieur à 20 (et prioritairement celles dont le BCF est supérieur à 1000) vont avoir une concentration plus dangereuse dans le poisson que dans l’eau. Or c’est notamment le cas du Mercure dont le BCF est de 9000. De nombreuses mesures de mercure, réalisées au lac Sainte-Claire (Canada), ont montré une quasi proportionnalité entre la taille des poissons et la teneur en mercure (Cf. UNEP, Evaluation mondiale du mercure, 2002). L’espèce de poisson ayant également une influence.

D'après : UNEP, Evaluation mondiale du mercure 2002, p94,  lac Sainte-Claire (Canada).
D’après : UNEP, Evaluation mondiale du mercure 2002, p94, lac Sainte-Claire (Canada).
La FDA (Food and Drug Administration) donne les conseils suivants basés uniquement sur les teneurs en mercure : pour les femmes enceintes et les jeunes enfants.
– Ne pas manger de requin, poisson scie, maquereau royal, ou de « Tile chameau »car ils contiennent une trop grande quantité de mercure.
– Manger au maximum 12 onces (environ 340gr soit 2 plats moyens) par semaine de différents poissons ou fruits de mer qui contiennent moins de mercure.
– Vérifiez les recommandations locales concernant les poissons pêchés par la famille ou des amis dans les lacs locaux, les rivières et les zones côtières. En l’absence de recommandations, ne pas dépasser 6 onces (un plat moyen) par semaine de poisson que vous prenez mais ne consommez pas d’autres poissons durant cette semaine.

Plus proche de chez nous, la présence de mercure à forte dose a été révélée sur un autre lac du littoral aquitain. Il s’agit du lac de Carcan Hourtin, pour lequel un arrêté préfectoral fût émis le 19 juillet 2012, interdisant la consommation de poisson sur le lac.